Dans l’esprit des non-initiés, il est fréquent que le braille apparaisse en tête des idées pour améliorer l’accessibilité aux personnes aveugles ou malvoyantes. Si vous êtes concerné comme moi par un handicap visuel, vous savez que le braille n’est pas la solution universelle, loin de là. Les équipements sonores et podotactiles sont bien plus efficaces pour aborder un lieu en autonomie. Mais quand c’est bien fait, et bien sûr pour les personnes qui connaissent cette écriture tactile, la signalétique braille est un vrai plus. Elle nous aide à confirmer où on est ou dans quelle direction on va. Où trouver cette signalétique, comment en tirer le meilleur parti et quelles sont les règles à respecter pour les installateurs ? Suivez-moi, c’est ce que nous allons voir en détails dans cet article.
Pourquoi du braille en signalétique ?
Le braille, système d’écriture tactile inventé par Louis Braille au 19e siècle, reste aujourd’hui un des moyens les plus efficaces permettant aux personnes déficientes visuelles d’accéder à l’information. Bien qu’on estime à seulement 10% les personnes aveugles qui maîtrisent le braille littéraire, une bien plus grande proportion est capable de déchiffrer quelques mots sur des emballages alimentaires, des boîtes de médicaments, des plaques de porte ou des boutons d’ascenseur. Le braille a donc toute sa place en signalétique, à condition qu’il soit positionné dans des endroits stratégiques, à savoir à portée de main. Car oui, ce n’est pas un scoop, les aveugles ne voient pas. Inutile donc de mettre du braille sur des plaques de noms de rues à 3 mètres du sol. Non, je n’exagère pas, ça s’est déjà vu !
Quand il est bien placé, le braille est très utile pour confirmer notre position ou notre direction dans un grand bâtiment, une gare ou une station de transport. On trouve souvent ces informations en braille sur des plaques de portes, des manchons de mains courantes ou des cartels. Et l’idéal, c’est quand elles sont accompagnées de signes visuels bien contrastés et en gros caractères, ou même de reliefs tactiles, pour que tout le monde, y compris les personnes malvoyantes qui ne lisent pas le braille, puisse s’y retrouver.
Du braille dans les ascenseurs
C’est sans doute l’endroit où vous avez le plus l’habitude de trouver du braille. La plupart des ascenseurs récents comportent en effet les numéros ou les noms d’étages à la fois en relief et en braille. De cette manière, qu’on sache ou non lire le braille, on a la possibilité de s’assurer qu’on appuie sur le bon bouton. La vocalisation du numéro d’étage permet en plus de confirmer qu’on est bien arrivé.
Si l’ascenseur de votre immeuble ne répond pas à cette norme, sachez qu’il est possible d’ajouter des étiquettes braille sur les boutons.
Du braille sur les plaques de portes
Il arrive de plus en plus souvent de trouver des inscriptions en braille sur les portes de chambres ou de salles dans les grands bâtiments. Ces plaques se situent généralement au centre de la porte ou à proximité du cadre. En cherchant un peu, on peut avoir de bonnes surprises.
Imaginez un peu la scène : vous êtes à l’hôtel, en train de vous acharner sur une porte, et d‘un coup, vous réalisez que ce n’est pas la vôtre. Plutôt gênant, non ? C’est pour ça que pouvoir lire le numéro de la chambre en braille, c’est tout simplement essentiel. Ça nous aide à être sûrs qu’on est bien là où on doit être.
Et bonne nouvelle : la loi est de notre côté. La réglementation accessibilité exigent que toutes les portes des chambres dans les lieux d’hébergement affichent le numéro ou le nom de la chambre en relief. Cela concerne les hôtels, mais aussi les pensions de famille, auberges de jeunesse, sans oublier les hôpitaux et les internats scolaires.
Arrêté du 8 décembre 2014, article 17 :
« Le numéro ou la dénomination de chaque chambre figure en relief sur la porte, présente une taille suffisante et un contraste visuel par rapport à son environnement et est positionné dans le champ de vision du client. »
La même règle s’applique aux numéros d’appartements dans les logements neufs. Vous avez bien lu, on parle de relief, de taille et de contraste visuel mais pas de braille. Or, vous savez comme moi que certaines personnes déficientes visuelles qui ont appris à lire et écrire en braille ne connaissent pas toujours les chiffres en caractères d’imprimerie. Il est donc fortement recommandé d’ajouter du braille sur ces plaques de portes et le surcoût n’est pas énorme. Des entreprises comme Okeenea proposent une gamme de signalétique accessible à tous.
Du braille sur les paliers d’étages
Là, c’est un peu plus délicat. La réglementation accessibilité s’appliquant aux logements et aux établissements recevant du public rend obligatoire le numéro ou le nom de l’étage en relief et en gros caractères visuellement contrastés sur chaque palier d’ascenseur.
Arrêté du 8 décembre 2014, article 7 :
« Le numéro ou la dénomination de chaque étage desservi par un ascenseur est accessible sur chaque palier, à proximité de l’ascenseur, par une signalétique en relief visuellement contrastée par rapport à son environnement immédiat et fixée de telle sorte qu’une personne présentant une déficience visuelle puisse détecter sa signification par le toucher. »
Mais, entre nous, trouver ces informations n’est pas toujours évident. Souvent, elles sont un peu cachées ou pas là où on les attend. On conseille donc de les placer près des commandes de l’ascenseur, ce qui augmente nos chances de tomber dessus. Et idéalement, il faudrait que ces infos soient disponibles en braille, tout comme pour les numéros sur les plaques de portes.
Si le palier a des mains courantes, une autre idée, c’est d’y ajouter indications en utilisant des manchons braille. Ce dispositif est très pratique et on a plus de chance de le trouver facilement.
Du braille dans les gares SNCF et les stations de métro
C’est un fait encore peu connu, il existe de la signalétique braille sur les mains courantes de nombreuses gares SNCF et de certaines stations de métro. Cette signalétique prend la forme de manchons braille. Positionnée au départ d’un escalier, de chaque côté, elle a pour fonction d’indiquer la destination de l’escalier, par exemple : « Voies A et B ». Ça évite de devoir emprunter un escalier sans savoir s’il mène là où on veut aller.
Vous trouverez aussi ce genre de signalétique dans certaines stations de métro à Paris ou à Lyon. Et pourquoi cette belle initiative ? Eh bien, c’est en partie grâce à la réglementation européenne sur l’accessibilité dans les transports ferroviaires, couramment appelée « STI PMR ». Alors la prochaine fois que vous êtes dans une gare ou une station de métro, n’hésitez pas à toucher les mains courantes quand vous recherchez une indication, vous pourriez avoir une bonne surprise.
Du braille sur des plans tactiles ou des cartels
Enfin, on trouve du braille dans l’espace public sur des plans à l’entrée de grands bâtiments ou sur des cartels dans les musées. Les plans tactiles sont très utiles pour se faire une représentation mentale d’un lieu et les indications en braille apportent de l’information complémentaire. On en trouve par exemple dans certaines mairies d’arrondissements de Paris, à l’Hôtel de Région Auvergne-Rhône-Alpes, à l’Office du Tourisme et à l’Université Lyon 3 à Lyon, au Louvre Lens, etc. L’entreprise Tactile Studio et l’Imprimerie Laville fournissent de nombreux dispositifs dans ce domaine.
Quant aux cartels en braille dans les musées, c’est aussi quelque chose d’assez courant. Mais il faut reconnaître que l’information audio est généralement beaucoup plus pertinente. Elle s’adresse à plus de monde et s’avère plus facile à consulter.
Quelques recommandations pour vos interlocuteurs
Si vous êtes amenés à donner votre avis lors d’une consultation sur de la signalétique braille, voici quelques principes de base à rappeler pour ne pas tomber à côté de l’objectif :
- Le braille, c’est fait pour être à portée de main : que ce soit sur un bouton d’ascenseur, un interphone, une plaque de porte, ou sur un plan multisensoriel, il faut que ce soit facile à trouver, sans avoir à tâtonner le long des murs.
- La position du braille doit être cohérente dans tout le bâtiment : au centre de la porte ou sur le mur côté poignée pour les plaques de portes et toujours à la même distance du début de la main courante pour les manchons.
- Le texte braille doit être court et clair : ceci permet un gain de place et facilite la lecture pour les braillistes occasionnels.
- Les dimensions du braille sont normalisées : il faut les respecter sous peine de rendre la lecture impossible.
Le référentiel AFNOR BP P 96-104 « Accessibilité aux personnes handicapées – Signalétique de repérage et d’orientation dans les établissements recevant du public » détaille toutes les recommandations pour une signalétique braille efficace.
Vous savez maintenant que, contrairement aux idées reçues, la signalétique braille est assez présente dans l’espace public. Mais quand on ne voit pas, on risque toujours de passer à côté. Avec ces nouvelles données en tête, n’hésitez pas à demander au personnel des établissements où vous allez s’il y a du braille dans le bâtiment. Et si ce n’est pas le cas, c’est peut-être le moment de le sensibiliser à son utilité et à lui suggérer d’en ajouter.
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